Dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique, la question de l'énergie tient une place centrale dans un mix énergétique encore fortement composé d'énergies fossiles. Ainsi, la « transition énergétique » vient reconfigurer un secteur électrique dont les paradigmes et la structuration évoluent. La dynamique d'électrification récente fait de l'éolien en mer une technologie centrale, avec un passage à l'échelle extrêmement conséquent (40GW envisagés pour 2050, par rapport à 0,5GW en 2022). Or, l'éolien offshore est une technologie centralisée qui doit s'implanter en mer, « territoire » chargé de très nombreux usages devant donc accueillir dans un horizon temporel restreint un nombre important d'infrastructures fixes et consommatrices d'espaces. Autour de la tryptique « zones, calendriers, volumes », la planification devient progressivement l'enjeu prioritaire d'un monde de l'énergie qui doit s'approprier, « cadastrer », un espace encore peu connu, avec ses propres activités et logiques.
La question de la planification de l'éolien en mer est donc celle de la rencontre entre la programmation énergétique (Programmation Pluriannuelle de l'Energie) et la planification maritime (Stratégie Nationale pour la mer et le littoral ; Documents Stratégiques de Façades). Ce processus peut être décrit, et nous souhaitons en restituer les épreuves, car c'est une configuration politico-administrative nouvelle qui se met en place autour d'enjeux devenus transversaux. Or, et bien que pilotée par l'Etat, la planification de l'éolien en mer n'est pas un exercice entièrement centralisé, et de nombreux acteurs organisés selon leurs propres intérêts participent plus ou moins directement à la production d'un ensemble de politiques visant à déployer cette technologie. En sous-texte, la planification de l'éolien en mer relève donc de la territorialisation de l'éolien en mer, c'est-à-dire de la manière dont elle va s'approprier (et être appropriée par) un territoire.
Pour comprendre ces processus, nous souhaitons étudier la gouvernance multi-niveaux de l'éolien en mer : cette nouvelle division du travail mérite d'être interrogée, ainsi que la capacité de l'Etat à travailler avec et coordonner des mondes dans l'objectif de déploiement d'une technologie spécifique. Parce que la planification est une production commune -mais contrôlée-, nous étudierons à tous les niveaux l'Etat et les acteurs qui y participent : RTE, syndicats de producteurs, organisations représentatives de la pêche, associations de protection de la nature et de l'environnement, collectivités locales.